Antoine - Antoine
« (…) Qu’est ce qui ne tourne pas rond, rond comme les cendriers pleins, comme les micros à boules, comme les trous des guitares, comme les dizaines de bouteilles vidées, rond comme l’arrangeur qui donne de grandes claques aux "Problèmes" (…) »
Cet extrait du texte du directeur artistique Christian Fechner figurant sur la pochette symbolise bien le premier album d’Antoine. Antoine, un genre de Bob Dylan français, un tant guitariste solitaire, un tant soutenu par son backing band, « Les Problèmes ». En cette année 1966 il symbolise par sa chanson « Les Elucubrations », une contestation préfigurant Mai 68, mais surtout, à la manière de Jacques Dutronc, Nino Ferrer, ou Michel Polnareff, représente cette nouvelle scène française se calquant sur les groupes Anglo-Saxon et tournant le dos à la scène Yé-Yé française : le French Beat.
« Qu’est ce qui ne tourne pas rond chez moi » ouvre l’album d’une manière stupéfiante : orgue Hammond, basse lourde, parole naïve, est-ce bien un groupe français qu’on entend là ? Et oui. L’album alterne ballade d’Antoine et morceaux avec son groupe. Sur « Ne t’en fais pas pour ceux-là, ils rêvent », Les Problèmes sont énormes, les arrangements digne des plus grands groupes Anglo-Saxon, avec une association orgue-piano du plus belle effet. Sur « La Guerre », c’est un peu la folie générale avec une guitare lead significative.
La face 2 repart sur « Les Elucubrations d’Antoine », son morceau le plus significatif. Là encore le chant d’Antoine associé aux Problèmes fait mouche. On continue avec des ballades comme « Pourquoi ces canon », « J’ai oublié la nuit ». Encore un hymne contestataire avec « Métamorphoses exceptionnelles », qui ressemble étrangement à « Fait pas ci, fait pas ça » de Jacques Dutronc.
A l’image du premier album de Dutronc, cet album d’Antoine (qui suscite rarement l’enthousiasme, les gens ayant l’image des publicités pour une célèbre marque de lunettes en Polynésie), marque la naissance du French Beat. Scène éphémère, qui verra ses principaux acteurs tomber dans la variété, à l’image d’Antoine, Dutronc, les Problèmes devenant « Les Charlots ». On y aura cru, pour une fois, que la France ne se coupe pas du reste du monde et adopte une scène digne des groupes américains ou anglais, mais le French Beat ne dura pas plus de deux ans. Au final, cela le rend plus jouissif encore.
Décembre 2012, écrit par
Bokacola